2021 : Année de l’animation ?

Et si l’année 2021 était l’une des années les plus prolifiques en matière d’animation ? C’est une affirmation que je tends bien à valider en parlant de trois créations d’animation, venues d’horizons et d’inspirations diverses et variées ! 

Des sommets glacés jusque dans les tréfonds des forêts irlandaises, en faisant un détour par une cité mécanique, je vous invite à me suivre dans ce rapide coup d’œil des créations les plus marquantes, à mon sens, dans l’univers de l’animation. 

Le sommet des dieux 

(22 Septembre 2021, patrick imbert)

S’il y a bien un milieu hostile à l’Homme qui soit devenu le maelström attirant toutes les convoitises et les désirs d’élévation, c’est la montagne.

Je ne parle ici pas de petites hauteurs, mais bel et bien de ces lieux hors de toutes activités humaines à des lieux, nichés au plus près des Dieux et arrivant presque à les toucher, à quelques milliers de mètres d’altitude. Sur leur délicates cimes blanche albâtre, rares sont les Hommes à en avoir arpenté les confins enneigés, mais ils continuent à les affronter. Mais pourquoi ? Que recherchent donc tous ces hommes en bravant les hauteurs, quitte à en perdre la vie ?

LE SOMMET DES DIEUX, film d’animation français adapté du manga éponyme, offre un récit poignant qui traite justement avec la plus belle poésie de cette passion enivrante qu’est l’alpinisme. À travers le regard d’un photographe en quête d’un appareil photo qui pourrait révolutionner le monde de ce sport dangereux, on assiste en parallèle à l’épopée d’un alpiniste disparu depuis des années, qui pourrait bien posséder le dit appareil. Ce duo permet d’offrir une vision unique d’une pratique sportive qui dépasse largement le stade de l’exploit sportif pour s’élever à une sorte de voyage spirituel.

Un voyage sublimé par la bande originale de Amine Bouhafa qui, entre envolées au violon et délicates sonorités tibétaines, fait osciller notre cœur tandis que les sublimes images nos yeux. En effet, les compositions picturales savent aisément conférer un profond sentiment de solitude et de gigantisme, déferlant sur nos protagonistes durant leur ascension solitaire. 

Ainsi, LE SOMMET DES DIEUX de Patrick Imbert trouve une justesse infinie, autant dans sa composition visuelle de toutes beautés que dans sa philosophie qui touche à la grâce dans les dernières minutes, symbolisant à merveille la quête infinie de l’alpinisme.

Maintenant, je vous propose de quitter ces hautes cimes enneigées pour se diriger au cœur du folklore irlandais du 16ème siècle !

Le peuple loup

(20 Octobre 2021, Tomm MOORE et ross stewart)

Cela faisait si longtemps que je n’avais pas pleuré à chaudes larmes, ému par une telle esthétique aussi communicative dans les émotions qu’elle transmet, que j’en avais oublié l’effet que ça fait.

Il faut dire que Le peuple loup n’y va pas de main morte dans sa volonté de dépeindre un contexte complexe et sombre, à savoir l’Irlande du XVIIème siècle, en proie à la main mise anglaise. Face à nous, une jeune fille nommée Robyn vit une existence morne enfermée dans les murs de sa ville et espère un jour montrer à son père chasseur de loup qu’elle aussi est capable d’en tuer un de ses mains. Mais de par sa condition de fille et d’enfant, il lui est interdit de sortir dehors, tant le risque de se faire attaquer par des meutes de loups est grand... Pourtant, un jour qu’elle y parvient, suivant son père à travers bois, une rencontre inattendue l’attend.

Et si la solution pour se débarrasser des loups n’était pas celle qu’elle pensait ? Et si ces mystérieux wolfwalkers, humains vivant parmi les loups, n’étaient pas que des légendes ?

À travers son coup de crayon, non sans rappeler de vieilles peintures médiévales à la perspective écrasée, ce film d’animation réussit haut la main son pari d’être un film à la portée des enfants comme des adultes. Les thèmes qu’il traite avec justesse ne cherche pas à infantiliser le spectateur et sont parfois aussi sombres et durs que l’atmosphère dans laquelle ils baignent : une ignorance crasse et une peur de l’autorité royale suffisent amplement à museler tout un royaume ainsi que sa culture, lui faisant oublier les pactes menés avec d’anciens mythes de la Forêt, la condition épuisante d’une jeune fille de la cour, la soumission à l’autorité...

Le peuple loup se drape d’une énergie visuelle incroyable, où les coups de crayons se mélangent à une aquarelle éclatante de couleurs, et où les musiques accompagnent à merveille l’ambiance celtique, à grand renfort d’un Bruno Coulais ayant déjà opéré sur plusieurs pépites et d’une Aurora chantant un thème dont je ne peux déjà plus oublier l’écoute. 

La délicatesse du trait, laissant souvent et volontairement voir les esquisses au travers des personnages, donne l’impression d’assister à une peinture vivante dont les mouvements peinent à ne pas dévoiler les coulisses de leur création et l’histoire proposée en parallèle n’a rien à envier à un Miyazaki, tant il arrive à nous immerger dans un contexte où contes et légendes disparaissent comme peau de chagrin au profit de villes humaines toujours plus gigantesques. 

Les mots de Thomas Hobbes dans son livre Léviathan disant que «L’Homme est un loup pour l’Homme» n’auront jamais été aussi tangibles que dans ce long métrage d’une beauté visuelle exceptionnelle et d’une histoire larmoyante à souhait.

Après cette incursion merveilleuse dans les films d’animation, il serait bon de ton de parler d’une série d’animation ayant marqué l’année dans des proportions exceptionnelles, j’ai nommé…

Arcane

(6 Novembre 2021, Studio Fortiche)

Douze ans.

Douze ans que le jeu vidéo League Of Legends excite l’imaginaire comme l’esprit de compétition de la scène vidéoludique.

Douze ans que certains fans de la première heure attendaient avec résolution une adaptation animée de cet univers aux ramifications multiples. 

Finalement entamé en 2016 par le studio d’animation français Fortiche, le chantier devenu titanesque ne nous aura dévoilé ARCANE qu’en fin d’année 2021.

Désormais, c’est ce fameux mot qui suscite toutes les excitations, ARCANE, et face à des avis unanimes et dithyrambiques, je ne pouvais que me laisser tenter par l’expérience de visionner les neuf épisodes de quarante minutes qui composent actuellement cette série. 

A mon sens, l’une des forces que doit proposer un univers imaginaire pour nous donner envie de nous y plonger sans retenue est la forme, dans son expression la plus pure. Rares sont les créations ayant réussi à instiller en moi cette envie de voyage, de découverte et de dépaysement total. ARCANE réussit bien au-delà de mes espérances les plus folles à proposer un univers d’une richesse visuelle effarante, couplé à une direction artistique maitrisée de bout en bout. C’est bien simple, aucun plan n’est à jeter dans sa composition, que ce soit ceux dont le montage offre des transitions d’une beauté symbolique extravagante, ou bien les simples passages dévoilant timidement de gigantesques environnements bardés de structures steampunk. 

Si les influences fleurent bon les jeux vidéo tels que Dishonored (comment ne pas ressentir une inspiration lyonnaise derrière tout ça, quand on sait qu’une certaine majorité des diplômés de Emile Kohl se sont retrouvés chez Arkane Lyon, un studio de jeu vidéo derrière Dishonored  ? ) ou encore Bioshock , on ressent aussi une passion et une envie de bien faire sans égal tout le long du visionnage, tant la minutie du détail y est excessive.

De nombreuses séquences très clip donneront le vertige tandis que d’autres nous émouvront sûrement, mais une chose est désormais sûre : Au travers de cette histoire de deux sœurs se retrouvant au cœur d’un conflit politique d’ampleur, ARCANE devient une référence en matière de série d’animation, ancrant certains personnages et panels de l’univers dans l’imaginaire collectif, comme l’avait fait League Of Legends il y a douze ans.

J’espère vous avoir convaincu à découvrir ces créations sorties de l’imaginaire de multiples esprits aux inspirations variées ! 

Morgan CHARLES 30 juin, 2022
Morgan CHARLES 30 juin, 2022
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