Camille Lepage était photoreporter. Lors d’un reportage, dans la région d’Amada Gaza, en République Centre-Africaine elle est assassinée. Elle avait 26 ans.
Après avoir découvert ses travaux, le réalisateur français Boris Lojkine décide de rendre hommage à la jeune femme et à son travail. Le film est réalisé en 2019 et le succès est immédiat.
Il s’agit d’un biopic sur le parcours de Camille Lepage, photoreporter française, originaire d’Angers. Il raconte la quête de cette femme qui cherche à mettre en avant les conditions difficiles des populations en République Centrafricaine.
L’histoire se situe en 2014. L’ex-rébellion Séléka, composée majoritairement de musulmans, prend le pouvoir entre mars 2013 et janvier 2014. En réponse à cela, les « Anti-Balaka », des milices chrétiennes opposées aux Séléka, installent un climat de violences et de terreurs au sein de la RCA. Le pays sombre petit à petit dans le chaos. C’est pour cette raison que Camille Lepage souhaite interpeller les autorités sur « les conséquences et les raisons de ce conflit ».
Un important travail de recherche a été effectué, afin de s’imprégner au mieux de la vision de Camille : comment photographiait-elle ? Quelles étaient ses inspirations ? Quel regard avait-elle sur les Autres. Afin de réaliser ce film, Boris a tenu à utiliser le « format 1,5 » : un format photographique utilisé dans le travail de Camille et par de nombreux journalistes. Cette technique donne beaucoup de mouvements et de reliefs au long-métrage. La caméra retransmet le mouvement d’un appareil photo à la recherche de ses sujets, pris dans la tourmente. Les équipes ont travaillé à partir des images d’archives de la jeune femme pour s’imprégner des décors, des gestes, des techniques. Il s’agit-là d’une retranscription très réaliste, ce qui nous emporte directement dans l’histoire.
Ce qu’il faut souligner, c’est que mis à part Nina Meurisse - l’interprète de Camille - et d’autres acteurs interprétant ses collègues, plus de la moitié du casting est originaire de Centre-Afrique. Cela rend l’histoire d’autant plus authentique. La retranscription de l’histoire est si réaliste parfois, qu’il est compliqué de faire la différence entre fiction et réalité. Par exemple, les photos de Camille Lepage apparaissent à certains moments de l’histoire. Notamment lors des scènes de conflits qui sont d’une extrême violence. Les photos ont un fort impact, puisqu’on regarde un film, avec des acteurs et des figurant. es. Mais cela nous rappelle que ces évènements tragiques ont réellement eu lieu. Ce n’est pas toujours simple à regarder, mais « Camille » est un beau devoir de mémoire.
A travers le regard de la journaliste, on suit l’évolution de la situation du pays.
De plus, ce film met en lumière toutes les problématiques liées au regard porté sur l’Autre, à la différence. En effet, Camille est perçue comme la « petite Blanche » (cf. film) qui prend des photos dans son propre intérêt. Mais pour elle, le fossé n’existe pas. Dans le film, elle se lie d’amitié avec un groupe d’étudiants à Bangui (Cyril, Abdou, Leïla), et passe la plupart de son temps à leurs côtés. Elle les accompagne dans leurs luttes, leurs désillusions. Camille veut briser les barrières qu’il y a entre elle et Eux. Elle veut comprendre et veut montrer au monde les conséquences tragiques du conflit centrafricain.
La réalisation d’un biopic n’est pas un exercice facile, mais Boris Lojkine réussit à nous faire rentrer dans le point de vue de Camille, sur ce conflit qui a touché le Centrafrique en 2014. Le film a été projeté en septembre 2019 à Bangui. Dans une interview donnée à Télérama, le réalisateur explique qu’il a été très bien reçu par le public. Nombreux l’ont remercié, et certains étaient émus de revivre cet évènement douloureux à travers ces images. On ressent toute la passion de la jeune reporter : montrer et sublimer cette région qu’elle aimait tant. Le parcours de Camille est bouleversant et inspirant.
« Camille » c’est bien plus qu’un film retraçant le parcours d’une jeune photojournaliste. C’est un hommage à son travail, à sa détermination, à sa ténacité, à son empathie.
Il est possible de retrouver toutes ses photos sur la page Camillelepage.org