À l’occasion du Festival Écrans Mixtes, du 1er au 9 mars 2023, les réalisateurs Terence Davies et Christophe Honoré font partie des invités d’honneurs du festival. En effet, le festival propose une programmation des principaux films majeurs des deux cinéastes, accompagnée d’une masterclass afin de mieux comprendre leur univers. Voici un résumé de leur rencontre.
TERENCE DAVIES, le cinéaste fasciné par le temps
Au cours de la conférence à l’Institut Lumière, animée par Eva Markovits, Terence
Davies raconte son parcours de réalisateur, partant de son enfance à des anecdotes de tournage. Peu de spectateurs dans la salle connaissent sa filmographie, et il va pendant ces 1h30 résumer son univers.
Pour Terence Davies, tout commence avec le film Chantons sous la pluie et les comédies anglaises, c’est à partir de ce moment-là que naît son amour pour le cinéma. D’autres films marquent et fondent sa personnalité de cinéphile : Ballon rouge ou encore La robe rouge. Davies s’imprègne également de la littérature,
notamment de Stephan Zweig avec Lettre d’une jeune inconnue. Par la suite, il se lance dans des études d’art et intègre à la Coventry Drama School. C’est là-bas qu’il réalise son premier scénario, Children en 1976. Il l’écrit en trois semaines, et avec du recul, c’est selon lui un de ses scénarios le plus « catastrophique ». Il fait quelques années plus tard, en 1980 et 1983, Madonna and Child et Death and Transfiguration. Avec ces trois films il produit une sorte de synthèse, The Terence
Davies Trilogy, qui est alors présenté dans de nombreux festivals en Europe et aux États-Unis, où il est récompensé par divers prix. Il réalise d’autres films notamment le plus récent, réalisé en 2021, intitulé Benediction. En effet, ses scénarios sont tous réalisés par lui-même, il souligne d’ailleurs qu’il imagine
les scènes dans son esprit, les reproduisant directement sur les scènes du tournage. Les thématiques récurrentes de ses réalisations sont la souffrance émotionnelle ou physique. Il a aussi une obsession sur le jeu de la mémoire et de la temporalité, avec la plupart du temps une période temporelle fragmentée. Terence Davies utilise de manière récurrente la notion de la sensation,
un concept primordial pour la réalisation de ses films. Le son de ses films est aussi un élément-clé pour lui. Cela permet de fixer au sein de la mémoire du spectateur les images. Il souligne d’ailleurs que le silence est aussi important que le son. Il dit composer ses films comme une sorte de symphonie avec des structures symétriques, en alliant image et son. Quant au jeux d’acteurs, il apprécie l’idée de la sincérité et non de l’artifice. Ainsi, Terence Davies se présente comme un artiste aux multiples facettes en tant que scénariste, réalisateur, romancier et acteur avec une volonté de représenter sa propre vision de son art avec simplicité et sincérité, sans passer par la grosse industrie cinématographique.
CHRISTOPHE HONORÉ, le cinéaste aux multiples facettes artistiques
Christophe Honoré a réalisé sa masterclass au Théâtre des Célestins, accompagné par Jean-Marc Lalanne. Pendant l’intervention, il a retracé, de manière similaire à Terence Davies, son parcours de cinéaste, en passant par son enfance ou encore sur la situation actuelle de la production du cinéma français. Honoré a réalisé quatorze longs métrages, avec les plus connus comme Chansons d’amour (2007), Les Biens-aimés (2011) et Plaire, aimer et courir vite (2018) pour lesquels il remporte des prix ou une reconnaissance dans des festivals. Avant d’être réalisateur, Christophe Honoré raconte qu’il est en premier lieu romancier, notamment pour la jeunesse avec son œuvre Tout contre Léo en 1995. Il est imprégné d’une certaine culture littéraire, avec certaines œuvres qu’il évoque pendant la conférence comme Marguerite Duras ou Marcel Proust. Il poursuit l’écriture de romans, mais il décide également de se lancer en tant que chroniqueur pour plusieurs revues, dont les Cahiers du Cinéma. Avec humour, il dit d’ailleurs être peu apprécié par le monde de la critique d’art. Aussi, il se met à réaliser des pièces de théâtre comme Les Débutantes, à l’occasion du Festival Off d’Avignon en 1998. Comme certains cinéastes, Christophe Honoré dit posséder un acteur fétiche dans ses films : Louis Garrel. On le retrouve dans ses films majeurs notamment Ma Mère ou Chansons d’amour, mais aussi dans ses pièces de théâtre. Certaines de ses œuvres sont considérées comme faisant écho à sa personnalité artistique ou sa propre expérience personnelle comme Dans Paris ou encore Le Lycéen, même si lui-même ne cesse de répéter, à la manière de Proust, que le « moi » réel est différent du « moi » de la fiction. Il y a aussi une partie de sa filmographie qui se distingue du reste, en particulier Métamorphoses ou encore Les Malheurs de Sophie. Comme indiqué avec les titres, ce sont des films plutôt orientés vers des échos à des œuvres littéraires, avec Ovide et la comtesse de Ségur. Il dit aimer avoir différentes phases de créativité dans sa filmographie, et considère avoir la chance de posséder une certaine liberté artistique, même s’il avoue avoir eu des contraintes de production pour certaines oeuvres. Ainsi, Christophe Honoré est un artiste orienté vers plusieurs médiums, permettant de lier et d’enrichir ses oeuvres. Il met en avant sa propre personnalité artistique, en puisant à la fois dans sa vie personnelle mais aussi dans ses expériences artistiques qui marquent profondément sa créativité.
Finalement, si je devais résumer ce focus sur ces deux réalisateurs : allez les découvrir, ce sont deux réalisateurs riches en créativité, avec des oeuvres qui marquent les esprits et révélant une personnalité singulière et sincère pour chacun d’entre eux.