De nos jours, les films portant sur les tueurs en séries attirent de plus en plus l’attention. Il suffit de taper « tueurs en séries » dans la barre de recherches de « Netflix » pour tomber sur une multitude de suggestions de films, séries ou encore documentaires qui traitent du sujet. Ces films ne sont pas nouveaux puisqu’on retrouve les premiers à partir des années 60 et cette fascination morbide continue de perdurer à travers les décennies. Mais on peut se demander pourquoi les histoires autour des tueurs en série intéressent autant de monde ? J’ai posé cette question aux quelques personnes que je connaissais férues de thriller, et la réponse qui en ressort est souvent la même : « On veut savoir ce qui les pousse à en arriver là - Comment ils s’y prennent- Dans quel but ? … »
Je suis d’accord avec vous, ces réponses ne sont pas suffisantes et méritent d’être approfondies.
Personnellement, Seven de David Fincher est le premier thriller qui m’a marqué. C’est d’ailleurs ce film qui m’a poussée à regarder tout le reste de sa filmographie. Ce film retrace une enquête menée par deux policiers, interprétés par Brad Pitt et Morgan Freeman. Ce qui est fascinant c’est que dans ce film, la tension est palpable du début jusqu’à la fin. Frank Lafond, auteur de Cauchemars Américains a d’ailleurs démontré que lorsqu’on regarde un film d’horreur on peut comparer nos sensations à celles que l’on ressent lorsque l’on fait des montagnes russes. Plus précisément, on a une montée d’adrénaline qui peut vite nous rendre addicts. On constate que dans la plupart des grands thrillers les tueurs en série sont souvent représentés comme des êtres supérieurs et dotés d’une grande intelligence. Prenons les exemples suivants : Hannibal Lecter dans Le silence des agneaux qui est à l’origine psychiatre ou encore Christian Bale, dans American Psycho qui est un homme reconnu dans le monde de la finance. D’ailleurs, selon Stéphane Bourgoin, auteur et spécialiste dans le domaine des tueurs en série, Hannibal Lecter serait l’incarnation moderne des monstres qui nous terrifiaient dans notre enfance.
A travers le genre cinématographique du Thriller, nous, spectateurs, trouvons un moyen de nous évader de notre réalité, si ce n’est, la regarder autrement. En effet, les histoires sont bien souvent inspirées de faits réels. Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile est un film sorti exclusivement sur la plateforme « Netflix » en 2019 et retraçant l’histoire d’un célèbre tueur en série. Ted Bundy aurait agressé et assassiné de nombreuses jeunes femmes et filles durant les années 70. On retrouve en tête d’affiche Zac Efron dans la peau du serial killer et Lily Collins dans le rôle de sa compagne. Pour ma part j’ai regardé ce film sans avoir aucune connaissance préalable sur cette affaire. Ce film m’a surprise puisque j’ai été persuadée jusqu’au dénouement que Ted Bundy était innocent. Selon moi, la performance d’acteur de Zac Efron est remarquable puisqu’elle nous pousse à nous interroger sur notre rapport personnel au crime, à la fascination naturelle que l’on porte de manière assez courante aux tueurs en série. Soulignons toutefois le fait que ce film a pu diviser le public. Pour certains cette histoire est apparue trop romancée. Mais cette romance perçue par une partie de la critique peut être retorquée par le fait que Ted Bundy est justement connu pour avoir joué de ses charmes et su se rendre attachant. C’est d’ailleurs pourquoi sa culpabilité fut longuement remise en cause.
Au 20ème siècle, au moment de l’éclatement de diverses affaires de meurtres en série comme celles-ci dans les médias (on pense par exemple à l’affaire de Gary Ridgway qui aurait commis jusqu’à 90 crimes dans les années 80) on a pu observer un phénomène bien étrange principalement chez les jeunes filles. Une grande quantité de femmes plutôt jeunes seraient allées jusqu’à entrer en contact avec les tueurs en série, via le biais de lettres. On retrouve d’ailleurs ces comportements vis-à-vis de l’histoire de Ted Bundy. Ce phénomène est loin d’avoir disparu et a évolué puisqu’il est aujourd’hui possible de partager cette attirance morbide sur les réseaux sociaux. De nombreux « comptes fan » de tueurs en séries regroupent des milliers de followers sur Twitter.
Pour revenir au cinéma, parlons maintenant de la série Mindhunter réalisée par David Fincher, maître en matière de thriller. Pour contextualiser, cette série retrace les débuts du profilage aux Etats-Unis à travers le prisme de deux agents du FBI. Nous allons donc nous pencher sur le plus jeune des deux, Holden Ford. Durant ses recherches sur le terrain, Holden va petit à petit tisser des liens avec Ed Kamper, un célèbre tueur en série. Le spectateur cultive l’espoir qu’une vraie amitié puisse naître entre eux au fur et à mesure des rencontres. Ce schéma narratif de rencontre « Tueur / policier » se retrouve d’ailleurs dans le film True Story seulement là ce n’est plus un policier mais un journaliste. Le héros retourne finalement à la réalité
après s’être rendu compte que ses émotions ont pris le dessus et qu’il s’est laissé manipuler. Quand on regarde un thriller, on a cette volonté, malgré tout, de vouloir humaniser le tueur. On aimerait croire que malgré leurs meurtres abominables, ils possèdent tout de même une part de bon en eux, car il est difficile pour l’humain d’imaginer que quelqu’un est foncièrement mauvais. Beaucoup de personnes pensent qu’il faut être « tordu » pour aimer regarder des films de ce genre.
Mais au contraire, ces films réveillent un sentiment d’empathie en nous puisqu’il est légitime de chercher à comprendre ce qui a poussé ces êtres humains à commettre l’irréparable.
L’être humain possède la faculté incroyable de se laisser porter par ses émotions devant une oeuvre de fiction. Lorsqu’on regarde un thriller de nombreuses sensations s’emparent de nous : le dégoût, le stress, la stupeur, la compassion, le soulagement…
N’ayez crainte : si le stress devient trop palpable vous pouvez calmer vos émotions débordantes avec un simple bouton « pause ».
Ce qui est magique avec le cinéma et particulièrement avec les thrillers, c’est cette possibilité d’explorer la large palette de nos sentiments. Par exemple, ressentir un danger alors qu’on est totalement en sécurité, bien au chaud sous la couette.
D’ailleurs, mon avis se rapproche de celui de Serge Tisseron, psychiatre et auteur, sur le fait que c’est cette raison qui nous fait autant aimer le cinéma et particulièrement les thrillers. Alors, vous allez regarder quoi ce soir ?